Bonbon visuel

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=niqrrmev4mA[/youtube]

Lady Gaga a inspiré à Patrick Peccatte le beau concept d’image dropping. Découvrant son petit dernier, Alejandro, je retrouve cette impression curieuse que tous les effets citationnels dans ce clip très soigné fonctionnent moins comme des provocations à une inflation interprétative que comme de purs supports d’un plaisir qui se déguste comme on mange une glace.

Quoique l’univers convoqué soit cette fois plus éloigné de celui de la mode, la manière de mobiliser les images m’évoque toujours cette consommation du visuel pour le visuel qui hante le fatras citationnel de la mode – soit l’inverse de la tyrannie de l’érudition référentielle. La mode n’a fondamentalement pas de culture, elle se construit contre elle, dans une projection sans mémoire qui célèbre l’instant.

Pas de meilleure façon de nous remettre sous le nez cette vieille leçon que nous n’avons de cesse de vouloir oublier: l’image se consomme comme un bonbon, comme un fruit, comme un exta. Un flash, petit morceau de plaisir instantané – et ce que suggère Gaga, qui a l’air de bien connaître la matière: pas n’importe quel plaisir. L’un des plus puissants – qui prend aux tripes et se suffit à lui-même.

France-Inter, fini de rire

Dire « j’encule Sarkozy » n’est pas du meilleur goût. Mais saisir illico ce prétexte pour signifier son congé à l’auteur de la saillie est franchement dégueulasse. Didier Porte n’avait pas fait dans la dentelle dans sa chronique du 20 mai dernier. Mais faut-il que nous vivions dans une démocratie malade pour que l’offense d’un humoriste au chef de l’Etat débonde aussitôt la peur et l’autocensure? Sur France-Inter, l’humour sera désormais cul serré. On est prié de rire au claquement de bottes. La station n’était pas gaie, elle sera sinistre. A l’image de son directeur, qui sursaute dès qu’on ouvre un Carambar. L’exécuteur de Siné avait été nommé directement par Sarkozy. De bons esprits s’étaient demandé ce que ça changerait. Ils ont maintenant la réponse. Il ne manque plus que de reboulonner le sigle ORTF.

Test comparatif: Culture Visuelle contre Arrêt sur images

A ma gauche, Olivier Beuvelet: une analyse comparative argumentée, appuyée sur une théorie des usages visuels du journalisme, le 4 juin. A ma droite, Alain Korkos: le rapprochement de deux images, à peine commenté, le 5 juin. L’abonnement au premier site est gratuit, le second est payant. Choisissez votre camp!

Le deuil de Lady Di, preuve de l'œuvre médiatique

Dans son livre Media Crisis, le cinéaste critique Peter Watkins fait de la douleur réelle éprouvée par une large partie du public à l’annonce de la mort de Diana un outil de mesure de la puissance effective des médias. Extraits:

«L’ampleur de la réaction publique à la mort de Diana fut tellement disproportionnée qu’elle dépassa en intensité la plupart des exemples récents d’hystérie collective alimentée par les médias.

«Je peux comprendre l’émotion de ce jeune Anglais, venu assister aux funérailles de la princesse Diana pour lui rendre un hommage personnel, et qui parlait avec émotion de la visite qu’elle lui avait rendue à l’hôpital où il était soigné. Il s’agit là d’une réaction personnelle à une expérience personnelle. Beaucoup plus inquiétante fut l’immense émotion collective de ces milliers de personnes qui n’avaient jamais rencontré Diana et qui ne la connaissaient qu’à travers la médiatisation de l’écran et de la presse. (…)

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Un demi-siècle dans une photo?

Que veut dire une photo? Ou plutôt: que peut-on lui faire dire, que peut-on projeter sur une image, et à quelles conditions? En lisant le dernier numéro de Courrier international, une phrase du philosophe Jürgen Habermas me fait songer aux investigations sur Culture Visuelle de Sylvain Maresca, Audrey Leblanc ou Olivier Beuvelet. Au lendemain du sommet européen du 7 mai, ce dernier s’était notamment amusé à comparer les différentes versions retenues par les sites de quotidiens en ligne pour illustrer le message dudit sommet.

Dans « Qui veut sauver l’Europe? », Habermas commente en ces termes l’une de ces images: «Cette photo grinçante fixe les visages de pierre de Merkel et Sarkozy – des chefs de gouvernement éreintés, qui n’ont plus rien à se dire. Cette image deviendra-t-elle le document iconographique symbolisant l’échec d’une vision qui, pendant un demi-siècle, a marqué l’histoire de l’Europe de l’après-guerre?»

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Zahia, ou le remords du journalisme lol

C’est probablement parce que le spectacle footballistique n’est pas mon passe-temps favori que je n’ai d’abord accordé qu’une attention distraite à l’affaire Zahia D. Jusqu’au jour où j’ai lu l’article que lui consacrait Vincent Glad sur Slate.fr. Etoile montante du journalisme en ligne, Vincent est un ami dont j’admire le talent et l’esprit. Outre la pertinence de son expertise webistique, ses fans apprécient son ironie volontiers mordante et son art du second degré.

C’est pourquoi j’ai été quelque peu surpris de lire sous sa plume le constat désabusé de la mèmification de Zahia, où semblait se nicher comme un regret de l’emballement médiatique. Etait-ce bien mon Vincent, jamais assez vif contre les contempteurs de l’exposition online et autres adeptes du pour-vivre-heureux-vivons-cachés, qui citait ici Nathalie Kosciusko-Morizet? Comme un remords, plutôt qu’une image de l’accorte jeune femme, l’illustration du billet affichait le « coup de boule » de Zidane – ce qui a certainement détourné bien des lecteurs de Slate de la lecture de l’article.

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Mise en ligne de cours: l'image toujours à la traîne

Constat: malgré tout notre outillage électronique et toutes les promesses du web 2.0, mettre en ligne la version multimédia d’un cours illustré reste la croix et la bannière.

Depuis deux ans, nous avons testé au Lhivic diverses solutions. L’enregistrement vidéo présente des défauts importants: le son laisse généralement à désirer et l’éclairage est problématique en cas de projection. Il faut choisir entre voir le conférencier ou son diaporama. On peut remédier à ce défaut en post-production, en récupérant le Powerpoint projeté, mais le travail de montage requiert alors plusieurs heures. Si l’on ajoute la durée non négligeable de la compression et du téléchargement, il faut compter au moins une journée pour diffuser une version correcte d’un séminaire d’une heure ou deux.

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Conversation "La photographie vue par les blogs"

Dans le cadre des conversations proposées par la Fondation Henri Cartier-Bresson, Sam Stourdzé m’a invité à débattre avec deux prestigieux blogueurs: Rémi Coignet (Des Livres et des photos) et Marc Lenot (Lunettes rouges), tous deux hébergés sur la plate forme du Monde.fr, sur le thème: “Quelle critique pour la photographie? La photographie vue par les blogs”. Premier sujet de controverse: sous-domaine ou sous-dossier? Le mercredi 2 juin de 18h30 à 20h (Fondation HCB, 2, impasse Lebouis, Paris 14e. Réservation contact(à)henricartierbresson.org).

Laissez parler les photos

A quoi sert la photo dans la presse? Dominique Strauss-Kahn apparaît comme le favori socialiste des sondages pour 2012. Une côte suffisamment élevée pour inquiéter le Figaro.fr. Pendant qu’un papier intitulé « La candidature DSK à l’épreuve de la crise » aligne quelques arguments rationnels, la photo d’illustration tape sous la ceinture. Le portrait du patron du FMI le montre le regard fuyant, un œil globuleux, l’autre éteint, la joue tachée, le menton luisant (photo AFP). Pas vraiment une photo de vainqueur. Mais qui apporte de façon subliminale la réponse à la question. DSK peut-il gagner en 2012? Mais non, regarde comme il est vieux et décati! Le journalisme visuel ou l’art de la suggestion.

Laisser des traces

Discuté aujourd’hui avec Christian Ingrao de nos pratiques automémorielles respectives. En historiens accoutumés à l’apport crucial pour nos travaux des correspondances privées, c’est avec préoccupation que nous observons la désintégration de cette ressource, menacée par l’entropie que génère l’usage de la palette de plus en plus étendue de nos outils de communication (e-mail, SMS, chat, messagerie de réseau social, forum, commentaires, etc.).

Face à cette évolution, nous avons opté pour des stratégies diamétralement opposées, mais qui témoignent chacune à sa manière de notre souci de préserver des traces de l’activité personnelle. Christian a choisi d’archiver systématiquement ses e-mails (il a même tenté, si j’ai bien compris, d’archiver ses SMS) – soit quelque 80.000 messages à ce jour.

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