«Le grand public le connaît surtout pour le rôle de l’inspecteur Columbo, mais l’acteur avait joué dans de nombreux films», écrit 20Minutes.fr pour saluer la disparition de Peter Falk, faisant écho à de nombreuses nécros pareillement balancées. Traduction: star de la télé, ça ne vaut pas une cacahouette; pour prouver qu’on a été un grand acteur, rien ne vaut Cassavetes…
A-t-on besoin de la bénédiction de la culture légitime pour reconnaître le talent? On peut aimer Cassavettes et trouver que Columbo a été un formidable rôle, incarné à la perfection par un comédien surdoué.
Comme souvent, Umberto Eco n’est pas tombé loin quand il décrit Columbo comme la nouvelle manifestation du petit homme, héros au rabais de la modernité télévisée (De Superman au surhomme, Grasset, 1993). Mais l’auteur du Nom de la Rose était déjà trop star lui-même pour être encore sensible à la part de revanche de classe que comporte le feuilleton.
En promenant son imper crade et ses manières de beauf dans les salons de grands bourgeois convaincus de leur impunité, l’inspecteur venge les prolos du monde entier, qui n’aimeraient rien tant que secouer la cendre de leur cigare à deux balles sur le tapis angora et faire trembler les puissants d’un «encore un p’tit détail» (« just one more thing« )…
Oui, la télé peut parfois venger les pauvres, et Columbo a été un de ces feuilletons universels qui a signé la montée en puissance de la culture télévisuelle, l’envers satirique du personnage incarné au cinéma par James Bond, avec épouse légitime invisible et moyens riquiqui, quand le grand écran affichait ses pin-up et ses dollars. Une création d’époque, un rôle comme il n’y en a que quelques-uns par génération, que Peter Falk incarnait visiblement avec un plaisir gourmand. Salut, l’artiste!
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