Un Lartigue dans votre iPhone

J’avais analysé il y a quelques années les déformations de la célèbre photo de Jacques-Henri Lartigue intitulée « Grand Prix » (1913, ©AAJHL, voir ci-dessus). On peut aujourd’hui reconstituer l’expérience à l’aide d’un simple iPhone (ou de n’importe quel camphone).

A la manière des appareils photo classiques, celui-ci enregistre l’image verticalement, ce qui évite la déformation des mobiles dont le déplacement est parallèle au plan de prise de vue. Mais l’iPhone est aussi un outil photographique qu’il est facile de tourner dans un sens ou dans un autre, ce qui permet de vérifier que c’est bien la direction horizontale de l’obturation (ou, dans le cas de l’image animée, du balayage vidéo) qui produit les anamorphoses qu’on pouvait observer couramment au début du XXe siècle.

Ci-dessous deux photos réalisées au bord d’une route avec un iPhone tenu horizontalement, orienté à gauche, puis à droite. L’expérience montre que l’amplitude de la déformation s’accroit avec la vitesse du mobile.

Dominique à confesse

J’avais déjà eu l’occasion de noter l’unanimisme remarquable de la presse dans les différentes étapes du traitement de l’affaire DSK. Encore une fois, après l’entretien sur TF1 diffusé hier soir, les quotidiens réagissent avec un bel ensemble dans leurs choix visuels, au diapason d’une qualification qui tourne autour de la confession, de la contrition, de l’aveu et de la faute morale.

Le sourire, qui manifestait, dans les stations précédentes, la reprise de l’avantage, a disparu, au profit d’un air sérieux (on n’ose dire pénétré), dont les variantes légères sont d’autant plus perceptibles (comme celle du Midi Libre, qui choisit de montrer un personnage plus combatif).

Au total, l’opération de com est parfaitement réussie: on est passé mine de rien du registre judiciaire au registre moral, selon un scénario largement éprouvé par le personnel politique (qui ne reconnaît que les fautes qui n’entraînent aucune suite pénale).

Les Aliens sont fatigués

Depuis ce début septembre, je me suis fait embrigader par Caroline Broué pour son émission La Grande Table sur France-Culture (voir ma rubrique « radio« ). Ce qui fait que l’on me demande de temps à autres mon avis sur l’actualité culturelle. Ma dernière perplexité a été mise au menu de l’émission de vendredi prochain (12h55-13h30, avec Ollivier Pourriol et Mathieu Potte-Bonneville): les « aliens » du cinéma ont-ils encore quelque chose à nous dire?

La période récente a été particulièrement nourrie en films d’aliens et de soucoupes: de World Invasion. Battle Los Angeles (Jonathan Liebesman, mars) à Cowboys et Envahisseurs (Jon Favreau, août) en passant par Paul (Greg Mottola, mars), Transformers 3 (Michael Bay, juin) et surtout le très commenté Super 8 (J. J. Abrams, août). On attend également un remake de The Thing (Rob Bottin) en octobre et un The Darkest Hour (Chris Gorak) en décembre.

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La disparition de Nicolas Sarkozy

J’avais signalé au début de l’été la couverture de Match qui montrait Nicolas Sarkozy en costume de bain, aux côtés de Madame. Il est logique de refermer la page des vacances avec celle des Inrocks qui lui fait écho en affirmant: « Les politiques à poil devant la crise ».

Certes, on voit bien que l’original est moins poilu et moins svelte que le corps rajeuni du magazine. Il n’en reste pas moins que la vision d’un président en costume d’Adam constitue un accroc à sa majesté qui aurait pu valoir en d’autres temps, sinon un procès, du moins le grognement d’un Frédéric Lefebvre ou le rappel à l’ordre d’un membre de la majorité.

C’est le silence qui accueille cette image satirique qui intrigue. A un moment où les héros de la primaire socialiste occupent les colonnes et les ondes, on se demande à vrai dire si Nicolas Sarkozy existe encore comme personnage politique pour l’univers médiatique. Scotché au plancher par les sondages, absent des couvertures (à l’exception de celle du Point du 1er septembre, qui ressemble à un adieu), il semble désormais tenir du meuble dans lequel on se cogne plutôt que du porte-drapeau de l’avenir majoritaire.

Avec le recul, mon interprétation politique de la couverture de Match me paraît s’effriter. La pipolisation de l’image du président en bermuda n’était peut-être que le premier signe de sa disparition comme chef politique, l’avant-goût de la privatisation qui attend le papy et futur papa, qui troquera bientôt son habit présidentiel pour les plaisirs simples de la retraite et de la vie de famille.

Saturation des effets

Entendu l’autre jour David Abiker énoncer tranquillement: ce que fait Lady Gaga, c’est de la merde. Même s’il est particulièrement difficile, et peut-être impossible, d’évaluer sereinement les qualités de la production de la Lady, un tel verdict me paraît plus marqué par le préjugé que par l’à-propos. On peut ne pas apprécier ce que fait Gaga, mais ce n’est certainement pas « de la merde« .

Face à un tel monument de construction de la réception, ce qui m’intéresse sont mes propres perceptions et leur évolution. Il s’avère que j’ai noté au moment de sa sortie ce que je pensais de la chanson Téléphone, entendue par l’intermédiaire du clip de Jonas Akerlund. Or, précisément, je n’ai rien entendu du tout. A en juger par ma réaction tout entière focalisée sur l’avalanche des effets visuels, j’en arrivais à nier purement et simplement la composante musicale de cette proposition.

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