Zahia, ou le remords du journalisme lol

C’est probablement parce que le spectacle footballistique n’est pas mon passe-temps favori que je n’ai d’abord accordé qu’une attention distraite à l’affaire Zahia D. Jusqu’au jour où j’ai lu l’article que lui consacrait Vincent Glad sur Slate.fr. Etoile montante du journalisme en ligne, Vincent est un ami dont j’admire le talent et l’esprit. Outre la pertinence de son expertise webistique, ses fans apprécient son ironie volontiers mordante et son art du second degré.

C’est pourquoi j’ai été quelque peu surpris de lire sous sa plume le constat désabusé de la mèmification de Zahia, où semblait se nicher comme un regret de l’emballement médiatique. Etait-ce bien mon Vincent, jamais assez vif contre les contempteurs de l’exposition online et autres adeptes du pour-vivre-heureux-vivons-cachés, qui citait ici Nathalie Kosciusko-Morizet? Comme un remords, plutôt qu’une image de l’accorte jeune femme, l’illustration du billet affichait le « coup de boule » de Zidane – ce qui a certainement détourné bien des lecteurs de Slate de la lecture de l’article.

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Laisser des traces

Discuté aujourd’hui avec Christian Ingrao de nos pratiques automémorielles respectives. En historiens accoutumés à l’apport crucial pour nos travaux des correspondances privées, c’est avec préoccupation que nous observons la désintégration de cette ressource, menacée par l’entropie que génère l’usage de la palette de plus en plus étendue de nos outils de communication (e-mail, SMS, chat, messagerie de réseau social, forum, commentaires, etc.).

Face à cette évolution, nous avons opté pour des stratégies diamétralement opposées, mais qui témoignent chacune à sa manière de notre souci de préserver des traces de l’activité personnelle. Christian a choisi d’archiver systématiquement ses e-mails (il a même tenté, si j’ai bien compris, d’archiver ses SMS) – soit quelque 80.000 messages à ce jour.

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Un blogueur sachant bloguer

Je ne me suis jamais considéré comme un photographe. Tout juste quelqu’un qui, comme beaucoup d’autres, aime à produire ces images – un amateur, au sens premier du terme. C’est pourquoi j’ai décidé, il y a quatre ans, en ouvrant mon compte Flickr, de placer mes photos sous licence creative commons, autrement dit d’en autoriser la reproduction gratuite.

Depuis, plusieurs dizaines de mes photos se sont trouvées reproduites ici et là. Selon deux scénarios, et toujours la même ligne de partage. D’un côté l’internaute souhaitant illustrer son site, qui m’en fait au préalable la demande, ou m’en informe a posteriori, par un mail sur mon compte Flickr, ou encore le site de presse anglophone, toujours scrupuleusement poli, bien outillé, qui me permet de confirmer d’un clic mon accord pour la reproduction. Dans tous ces cas, c’est un plaisir de voir mes images reprises, employées dans des contextes particuliers, de façon aimable et respectueuse.

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La joie des Algériens après la victoire des Fennecs

Un reportage de Tatif sur Flickr.

« Après quatre jours de grande pression et de tension extrême, c’est la délivrance.
L’équipe nationale a réussi son pari de se qualifier en Coupe du monde 2010. Une bande de jeunes qui ne payaient pas de mine au départ, tant leur football était au creux de la vague, vient de prouver que l’on pouvait lui faire confiance.
l’Algérie ne pouvait rater cette rencontre avec l’histoire du continent qui organise pour la première fois une phase finale de la Coupe du monde. »

La presse en ligne ou le parasitage visuel

Au moment du bouclage d’une publication papier, les rédacteurs en chef examinent avec un soin fébrile le « chemin de fer » constitué par toutes les pages d’une édition mises bout à bout, chassant la moindre erreur de titraille, vérifiant l’équilibre visuel de la maquette.

Est-ce qu’il arrive aux éditeurs web de regarder le résultat de leurs mises en page sur écran? Arrivé via un signalement sur une page du Monde.fr, je m’aperçois que je viens de moins en moins souvent sur un site de presse. Quoi d’étonnant? Cette accumulation de signaux clignotants, de bannières animées qui s’agitent aux quatre coins de l’écran, chacun réclamant mon attention de manière impérative, ressemblent à la place Pigalle à l’heure de la sortie des bureaux et ne me donnent qu’une envie: celle de fuir cet envahissement agressif.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=X3XwSC3afPA[/youtube]

C’est le souhait de lire l’article qui me retient. Mais ce n’est pas facile. Tous ces clins d’œil intempestifs éparpillent ma vigilance et gênent constamment ma lecture. Le papier de Véronique Maurus porte sur le commentaire d’une photographie. Statique, en noir et blanc, si petite qu’elle est à peine lisible, cette illustration requiert une concentration et un travail analogue à celui de se frayer un chemin dans la foule.

A moins de procéder à une capture d’écran pour figer cette agitation sautillante, lire la presse en ligne demande un vrai effort. De là à penser que les éditeurs préfèreraient nous voir reprendre le chemin du kiosquier…

L'histoire revue et corrigée

Sarkozy réécrit l’histoire, les internautes aussi. L’affirmation obstinée de la présence de Nicolas Sarkozy à Berlin le 9 novembre 1989 a suscité sur le web une réplique visuelle sans précédent par son ampleur et son inventivité. Petite sélection en forme de promenade historique parmi les sites du Post, Libération, Facebook, Hashtable ou Nicolasyetait. Voir également sur Twitter: #sarkozypartout.

La légende de saint Nicolas

Rarement la catégorie des « Wall photos » (photos du mur) sur Facebook aura si bien porté son nom. Après avoir mis en ligne le 8 novembre sur le compte de Nicolas Sarkozy une photo légendée le mettant en scène face au mur de Berlin le 9 novembre 1989, les services de l’Elysée ont bataillé toute la journée d’hier pour accréditer une erreur devenue, au fil des versions et des mensonges, une vraie manipulation de l’histoire.

Il est impossible que ce récit (qui évoque « quelques coups de pioche ») ni cette photo (qui montre un mur déjà percé et un Nicolas Sarkozy attaquant la paroi au marteau) correspondent à la soirée du 9 novembre 1989. Pour la première nuit de l’ouverture d’un mur encore gardé par des soldats en armes, personne ne songe encore à dégrader ni a démolir le symbole. C’est donc la photo elle-même qui apporte la preuve la plus flagrante d’un conflit de temporalités entre la narration et la date alléguée. Des précisions ultérieures apportées par Rue89 ou Les Décodeurs permettront de situer avec plus de vraisemblance l’épisode le 16 novembre, une semaine plus tard.

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