L'oasis de nos rêves

Aujourd’hui, le moteur de recherche Google a changé son visuel pour saluer la confirmation par la NASA de la présence d’eau sur la Lune. L’eau, dans l’univers extraterrestre, c’est comme le sang chaud dans celui des dinosaures: la promesse d’une proximité, la signature d’une dynamique, le symbole de tous les possibles. L’eau, c’est le récit sous l’image, l’oasis de nos rêves.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=YrLuOFoPlRc[/youtube]

(CBSNewsOnline, 13 novembre 2009)

MàJ 15/11/2009 – Deux liens en complément:

  • la vision orthodoxe, par Pascal Riché sur Rue89, selon laquelle « la découverte d’eau par la Nasa pourrait ouvrir la voie à une future colonisation de la Lune ».
  • une version plus critique, par Sylvestre Huet sur Sciences2, qui laisse entendre à demi-mot que la photo « preuve » a fait l’objet d’une retouche attentive.

Les lecteurs de Tintin se souviennent que l’idée de la présence d’eau sur la Lune ne date pas d’hier. En faire aujourd’hui le ressort d’une nouvelle colonisation est évidemment burlesque. Accréditer cette théorie se fait essentiellement par l’image – par la fabrication (coûteuse) d’une science-fiction de synthèse qui a pour mission de donner corps au fantasme. Bref, rien de changé depuis 1952.

Memorial Day

Le 11 novembre 2008, Michèle Alliot-Marie désignait en conférence de presse les vingt personnes interpellées le matin même en Corrèze, à Paris, Rouen et dans la Meuse comme appartenant à « l’ultra-gauche, mouvance anarcho-autonome ».

« S’il est encore trop tôt pour évoquer la naissance d’une police politique ou d’une persécution d’opinion en France, les suites données à cette affaire permettront d’en juger », écrivais-je peu après. Un an plus tard, le doute n’est plus permis. En face des faits, le dossier monté par les enquêteurs, appuyé pour l’essentiel sur un ravaudage de l’Insurrection qui vient, mérite d’être relu (pdf). Et apparaît pour ce qu’il est: un pur délire.

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En Pléïade, combien de fois Twitter?

« Sans craindre que les cent quarante caractères imposés par Twitter ne viennent inhiber le lecteur d’une « Pléiade » de 2 500 000 signes, on peut s’interroger sur les conséquences de l’absence d’une véritable pratique de l’écriture, sur la disparition des correspondances et du temps de lecture qui leur est consacré. »

C’est Antoine Gallimard qui le dit, dans Le Monde daté du 31 octobre 2009. Quel rapport entre Twitter et La Pléïade, entre un outil de signalement en ligne caractérisé par sa brièveté et sa réactivité et les millefeuilles de papier bible, soigneusement reliés cuir pleine peau qu’on offre à Noël? Evidemment aucun, à part le fait que, l’un et l’autre relevant de l’écrit, on peut s’amuser à comparer leur nombre de signes. On comprend bien que derrière la Pléïade se cache toute la noblesse de la vieille culture, culottée comme une pipe en écume, avec un goût de bergamotte au coin du feu. Et que celle-ci, dans l’esprit de Gallimard, écrase de tout son poids et sa légitimité bourgeoise le méprisable trouble-fête de l’ère électronique.

Qui dira au bon père Antoine le ridicule de sa pesée? Qui aura le courage de lui révéler que c’est la petitesse de sa vision qui le condamne aux yeux des nouveaux lettrés? La plus grande insulte à la culture est de confier sa défense à des épiciers.