A quoi ressemble Lady Gaga?

Je ne connais pas très bien Lady Gaga. Entrevue ça et là. Mais l’impression demeure de ce jeu de cache-cache, un peu différent des autres. Madonna aussi se déguisait de mille manières, mais il n’y avait jamais le moindre doute: blonde ou brune, sans hésitation, c’était bien elle. Lady Gaga, c’est autre chose. Au-delà des costumes ou des masques, c’est parfois d’une image sur l’autre qu’on ne le reconnaît plus. Cette infidélité à son image, qui ressemble bien à une nouvelle stratégie médiatique, est déroutante. Nous avons tellement l’habitude d’une identité visuelle assignée: celle du visage – et probablement, par-dessus tout, d’une expression stabilisée et contrôlée –, comme une signature, qui a pour fonction de permettre de reconnaître le produit dans toutes les situations. La collection des portraits de Françoise Giroud à l’IMEC fait peur par la stabilité robotique de l’expression. Sans oublier l’impressionnante vidéo du sourire invariable d’Obama – mais ce cas extrême ne fait que souligner la demande que génère l’existence publique, qui réclame comme un dû cette constance d’un choix d’image. Lady G, c’est plutôt au fait qu’on ne la reconnaît pas qu’on la reconnaît. A quoi ressemble-t-elle au juste? Je ne suis pas sûr de le savoir.

10 réflexions au sujet de « A quoi ressemble Lady Gaga? »

  1. De fait, elle n’est réellement méconnaissable que sur les quelques photos où son visage est occulté ou carrément masqué. Sur les autres, on retrouve l’essentiel de ses traits, dont on peut conclure, sans du tout la connaître, que ce doit être une fille superbe.
    N’aurait-elle pas, dans ses déguisements et grimaces à répétition, qui inventorient l’imagerie du spectacle et de la publicité, un petit air à la Cindy Sherman ?

  2. @Maresca: « un petit air à la Cindy Sherman »: bien vu! Bien sûr, il n’y a pas « méconnaissabilité » totale – Lady Gaga n’est pas Fantomas. Mais ce que pointe son goût des masques, c’est qu’elle ne joue pas, me semble-t-il, le jeu de la reconnaissance de la manière habituelle. C’est en observant ses jeux expressifs et ses mimiques faciales que je me suis rendu compte à quel point la plupart des personnalités misaient sur une expression stabilisée et contrôlée (modèle Obama). Lady G présente une gamme beaucoup plus large, avec une tolérance à la non-reconnaissance dont l’intégration dans le schéma de l’image publique est me semble-t-il une nouveauté. Dans un paysage ultra-normé, il suffit en fait de ce petit tremblement pour remettre en cause le système de l’assignation par la fidélité à soi, qu’incarnent exemplairement les logiciels d’identification faciale.

  3. Vous aurez aussi remarqué qu’elle change fréquemment de chemise. Notamment aux MTV Video Music Award, elle a changé quatre fois de tenue dont le body de dentelle rouge ci-dessus.
    Elle n’est pas la seule, pratiquement toute star du divertissement qui se respecte doit changer de vêtement, pendant une même performance.
    Ne serait-ce pas aussi une manière de montrer sa « richesse » vestimentaire ?
    Ce qui me questionne également est la propension de montrer plus facilement ses fesses que son visage, à l’instar de ce personnage de prostitué dans un film qui acceptait le sexe tarifé mais « n’embrassait pas ».

  4. très bonne intuition…à noter que la résurgence d’une vidéo de Lady Gaga (Stefani Germanotta de son vrai nom) http://www.youtube.com/watch?v=_b2C20qN4Ps pré l’avatar Lady Gaga avait créé un mini-événement au sein de la hype new yorkaise http://gawker.com/5368476/lady-gaga-is-basically-fame-incarnate-nyu+era-video-surfaces … en tout cas Lady Gaga est vraisemblablement un cas d’étude de la figure pop qui risque de faire les beaux jours des historiens de la musique contemporaine…je conseille vivement à l’ensemble des lecteurs avisés fragiles des oreilles de faire une session silencieuse de l’ensemble des clips de Lady Gaga pour mesurer l’esthétique de son oeuvre visuelle et ré-évaluer son jugement sur la plus grosse vendeuse de sonneries de portable du moment…

  5. C’est son nom qui fait référence (pour moi) au titre d’une chanson d’un groupe, dont le leader était un autre « transformiste » (« Radio gaga » du regretté Freddy Mercury) : les souvenirs des premiers David Bowie, Alice Cooper et Prince (Mick Jagger a aussi abusé de cette ficelle usée jusqu’à la corde) en sont aussi de bons avatars (masculins, certes)

  6. Comme PdB, il me semble que le précurseur exemplaire des artistes « à transformations » est David Bowie, à travers ses divers personnages (Ziggy Stardust, The Thin White Duke, Major Tom…). On le reconnait cependant bien dans chacune de ses incarnations. Un autre artiste peu être moins connu mais qui a très puissamment et systématiquement joué avec différentes images : Aphex Twin – bien aidé par son « clippeur » Chris Cunningham. Mais il appartient à un genre – les musiques électroniques – ou des stratégies de disparition derrière des masques (à la Residents) voire d’anonymat radical ne sont pas rares, de Daft Punk (Paris) à Basic Channel (Berlin) en passant par Warp (Londres) et Underground Resistance (Detroit).

  7. Je suis étonné d’apprendre qu’il s’agit d’une personne unique, je pensais qu’elle faisait partie des artistes « trademark » de l’eurodance, qui ne sont pas des individus ni même des artistes (l’artiste c’est le producteur) mais des marques qui peuvent être incarnées par des personnes différentes ou qui ne peuvent exister qu’à l’intérieur de leur label (comme Soeur Sourire chez Philips, Prince chez Warner,…)

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