Qu’est-ce que la culture? Les approches classiques la définissent comme un capital: « l’ensemble des représentations collectives propres à une société » (Pascal Ory, La Culture comme aventure, Complexe, 2008, p. 11).
Cette définition laisse à mon avis de côté une dimension importante du phénomène. Ce qui distingue la culture d’un corps de connaissances quelconque est son caractère impératif, au sein du groupe où s’exerce son pouvoir. La culture, ce n’est pas seulement « something you know« , mais « something you should know« . Tous les effets citationnels constitutifs du fait culturel sont la démonstration de la prééminence conférée a priori au contenu de référence.
En d’autres termes, la culture est moins ce stock librement mobilisable qu’une manifestation identitaire, au sens où la perception de ce qui fait l’identité d’un groupe se constitue à partir d’un système de revendication, de reconnaissance et d’exclusion.
Du point de vue identitaire, ce qui est exclu du stock est aussi important que ce qui est inclus. Plutôt qu’un capital bénévolent libre d’accès, la culture est un outil de manipulation et de ségrégation par la connaissance. On n’a jamais fini de remplir les obligations auxquelles nous soumet la culture de notre groupe. C’est cette obligation qui fait la culture.
(Ces réflexions sont bien sûr inspirées par le pseudo et triste débat sur l’identité nationale, promu par le gouvernement de droite extrême élu par une majorité de Français – ce qui suffit amplement à répondre à la question, comme l’a bien résumé Cantona.)