Bon OK, la vieillesse est un naufrage – et la vieillesse d’un réac, c’est le naufrage d’un bateau gonflable au fond d’une piscine à sec… Quelle importance que pépé Sardou vienne vendre ses fantasmes zemmouriens sur les télés (et jusqu’au JT de France 2)? A l’énoncé des pièces à conviction – le come back d’un chanteur à voix qui a réécrit les paroles d’un des ses vieux succès, « Etre une femme », devenu « Etre une femme 2010 », tube de l’album éponyme mis en scène dans un clip copie conforme des pubs l’Oréal – je comprendrai que les râleurs m’accusent de psychanalyse capillotractée et autre sodomie de diptères.
[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=EF-JfYFaC7I[/youtube]
Oui mais. Depuis que j’ai croisé cet ovni chez CSP (qui lui règle justement son compte), je n’arrive pas à me défaire de l’idée que cette glissade dans la bouse du plus pur mauvais goût peut se lire comme un parfait symptôme de la triste régression qui caractérise l’époque. Sans doute, le tube de 1980 (Revaux-Sardou/Billon-Sardou) d’un chanteur déjà vintage, contraint de rajouter une sauce disco pour rester dans le coup, empilait déjà les clichés – mais dans une version transformiste plutôt marrante, avec force clins d’yeux en direction d’un féminisme désirable.
Trente ans plus tard, mes amis, quelle dégringolade! Passons sur la flight girl furieusement fifties de la pochette, qui indique déjà l’étendue des dégâts. On trouvera la dimension la plus achevée du symptôme dans le clip de Jean-Marie Antonini. Plus question pour Sardou de jouer la métamorphose ou l’ambiguïté. L’image de la femme se résume aujourd’hui au règne sans partage du modèle sophistiqué et artificiel imposé à nos rêves par la publicité pour cosmétiques, avec ses visages de cire et ses cheveux au vent des ventilateurs de studio.
En feuilletant les magazines people, je m’aperçois que le portrait retouché a désormais pris racine au milieu du dernier bastion du reportage sur le vif, et que les photos de paparazzi sont de moins en moins crades – permettant du coup d’accueillir ici et là quelques pubs proprettes, qui jurent moins avec les pages alentour… Sans rapport? Peut-être. Peut-être pas. Le jour viendra où l’Oréal envahira le territoire du people. On pourra alors considérer le hold-up de l’imagerie féminine comme achevé.
On pourrait croire à un fake… mais non.
la reprise semble dater de mai dernier :
http://www.google.fr/search?hl=fr&client=safari&rls=en&q=sardou+etre+une+femme+2010&aq=0&aqi=g2&aql=&oq=sardou+être+une+femme+2010&gs_rfai=
bon, sans autre commentaire…
un symbole de la beauferie phallocrate des années 😯 entièrement relifté , c’est ça être un homme en 2010 !
La chanson d’origine était extrêmement en phase avec son temps et avec le changement de la condition féminine dans toutes les couches de la société. C’est une chanson « années Mitterrand » de Sardou, une chanson à mon avis très pertinente à sa manière.
Le clip de « Femme 2010 » est intéressant du fait de l’extrême confusion qui y règne. Sardou a comme toujours tendu ses oreilles ici et là, d’où des tentatives assez vaseuses de connivence avec la gent féminine (parité/égalité,…), mais en même temps il manque un peu d’énergie et d’implication personnelle, le fait d’utiliser des femmes « l’Oréal » dans son clip, chastement dénudées sur un escalier céleste (le chanteur qui monte au paradis ? ça me rappelle un très étrange film britannique dont le titre m’échappe) entrecoupée de scènes de la « vie quotidienne » d’une jeune femme totalement composée de clichés pubesques, oui c’est très étonnant, un peu angoissant puisque, comme toujours avec Sardou, ce n’est qu’un symptôme de Sardou, c’est un symptôme de l’époque entière et de sa manière de se représenter elle-même.
C’est terrible cette nudité au milieu d’un clip plutôt propre-sur-soi. D’accord elles cachent leurs attributs mais la nudité ne sert absolument A RIEN si ce n’est nous plonger dans le fantasme masculin… En gros, sardou dit aux femmes : « travailles si tu veux ma jolie, soit indépendant de toute façon ça ne changera rien pour moi tu seras toujours à poil »
@Audrey : je les vois plutôt comme une référence foireuse à la statuaire classique que comme l’expression d’un fantasme, car c’est une nudité assez factice. Sardou ne semble pas en mener large sur son escalier.
il est bien le nouveau clip de Michel Sardouille. Ils ont eu du budget chez Groland.
Ah pardon, on me dit dans l’oreillette que ce n’est pas extrait de Groland. Ooops, la méprise…
@Jean-no: L’escalier du début est une citation du célèbre songe de Jacob: « Et voici, une échelle était appuyée sur la terre, et son sommet touchait au ciel. Et voici, les anges de Dieu montaient et descendaient par cette échelle » (Genèse 28, 10-17), passage qui a suscité une iconographie innombrable.
@André : Au fond de moi je devais le savoir mais j’ai toujours vu l’échelle de Jacob comme une échelle, je n’ai jamais fait le lien avec cet escalier céleste…
A dire vrai, Sardou n’est pas le premier chanteur à avoir mobilisé cette référence 😉
Led Zeppelin, Stairways to Heaven
http://www.amazon.com/Zeppelin-Greatest-Hits
@André : mais ce qui est étrange c’est que Sardou monte l’escalier, il me semble que ça a un sens (eh oui, le sens de la montée). D’une part c’est la fin de l’existence (artistique ?), et d’autre part, la récompense d’une vie de bonnes actions…
J’ai retrouvé le titre du film britannique dans lequel un soldat monte ce fameux escalier en rencontrant diverses personnes : A mater of life and death (1947), avec David Niven.
article minable
@Mat: vous n’êtes pas obligé de le lire !