Quelles sont les motivations de la consultation de YouTube? Principalement le loisir, le jeu, pensons-nous, accessoirement la recherche d’informations.
Ce matin, je trouve mon fils de 11 ans, à peine levé, devant l’écran de son ordinateur. Noël approche. Hier soir, nous avons évoqué les vacances de neige, il a demandé s’il pourrait faire du snowboard.
Ce matin, au saut du lit, c’est à YouTube qu’il a demandé de lui apporter l’image de son désir. Simple: taper « snowboard« , choisir une vidéo, cliquer sur la touche grand écran. Pour un garçon de son âge, habitué à recourir à cette boîte à trésors, quoi de plus normal que de rêver avec YouTube?
Une question est venu me hanter après la lecture de ce post : peut-on encore rêver sans taper l’objet de son rêve dans un moteur de recherche?
L’homme du futur choisira-t-il ses rêves sur YouDream?
On pourrait parler ici de science-fiction, mais peut-être pas pour longtemps après tout.
Ma fille (10 ans) n’a pas d’ordinateur dans sa chambre, elle lit le matin avant de prendre le petit déjeuner en famille, a commencé à écrire son deuxième roman (le premier en anglais), vient de réaliser son premier petit film avec ses copines pour Halloween (avec la fonction video de son coolpix), et veut un cadeau-surprise pour Noël…
naquenaquenèèèreu…
Félicitations pour cette activité prometteuse – et pensez à faire examiner votre fille par un médecin, elle est peut-être dopée à votre insu 😉
Je ne pense toutefois pas, comme vous semblez le croire, que l’usage d’un outil soit exclusif des autres. Comme en musique, jouer du violon n’interdit nullement de s’essayer à la clarinette ou à l’accordéon, et dans bien des cas, la pratique d’un instrument a plutôt tendance à encourager celle des autres.
« Pour un garçon de son âge, habitué à recourir à cette boîte à trésors, quoi de plus normal que de rêver avec YouTube? »
Et nous, alors ? J’utilise Youtube pour dénicher des musiques
(tiens, essayez ça :http://www.youtube.com/watch?v=3dWbD-6y59E)
Un site encore plus riche, si on se passe de l’image : musicme.com. Tellement plus riche qu’on doit y trouver aussi bien de la clarinette que de l’accordéon 🙂 Bon, je vous quitte : je vais y chercher la musique du film La trace, par Marc Perrone, THE accordéoniste folk.
Pier-Alexis : on choisit ses rêves partout, sinon ce ne sont plus des rêves…
Au risque de paraitre obscur, je dirais (et certains psychanalystes seraient certainement d’accord avec moi) que ce sont plutôt les rêves qui nous choisissent…
A voir sur un sujet équivalent le post de Gunthert sur le « trailer cut » révélant l’homogénéité des bandes-annonces des blockbusters et « machines à rêves » américaines : la prolifération des mêmes images sur la projection de différents rêves individuels finit par créer une sorte de rêverie collective qui rend le tout homogène bien sur, mais qui semble également faire émerger un imaginaire collectif assez vif et surprenant (rien n’est ni tout blanc ni tout noir après tout)…
Cependant, en ce qui concerne les réseaux de diffusion en ligne, je ne suis pas convaincu qu’on puisse y « choisir » du rêve, car l’on y est déja pensé en tant que sujet choisissant : le piège subtil, c’est la classification des vidéos, avec notation, nombres de vues, mots-clés… qui induit qu’un certain choix est déja fait pour nous, qui devient le nôtre lorsque l’on se l’approprie, mais qui reste quand même suggéré dès le départ (au contraire du rêve qui est un ensemble hétéroclite de traces mnésiques et de désirs pulsionels). Au fond, le système de référence reste encore le bouche à oreille (ou le mail!) qui dit « hé, t’as vu la nouvelle vidéo sur Youtube? », mais là aussi, on rentre d’une certaine manière dans l’imaginaire collectif…
@Pier-Alexis: pas d’accord (2e partie). Bien sûr, il y a toujours un dispositif. Mais la différence fondamentale entre anciens et nouveaux médias est bien la part active prise par l’usager, par l’intermédiaire du search, contre la consommation passive d’un produit qui nous est imposé. La croissance de la consultation d’internet (et la baisse corollaire de la consommation télévisée, voir l’enquête de l’INSEE) tient essentiellement à ce facteur.
A noter également que, par l’intermédiaire du pageranking, c’est bien nous qui déterminons la hiérarchie des contenus sur YouTube. Le succès des outils de Google repose fondamentalement sur la façon qu’il a eu d’inscrire la participation au coeur du search, de se servir des requêtes des usagers pour accroître la pertinence des résultats.
Je suis d’accord avec vous sur le fait que la consommation active change la donne. Il vaut mieux éduquer qu’imposer. Certes. Mais si l’on apprend pas à chercher, on ne trouve que les contenus les plus stéréotypés : c’est la fameuse blague sur les vidéos de chats, de bébés ou autres qui font des bêtises ou qui fonctionnent comme feu « video-gag » et sont visionnées des centaines de milliers de fois.
De même, le pageranking induit une hiérarchie, mais pour moi cette hiérarchie n’a pas de légitimité, en ce sens qu’il s’agit d’un jugement de valeur sans contrôle. Non qu’il faille en imposer un, ce serait l’inverse de l’expérience de liberté proposée par ces sites (et sur laquelle d’ailleurs Google rogne de plus en plus) cependant on assiste peut être là à la limite du système démocratique d’internet : le « plus de participation » n’implique pas automatiquement le « plus de qualité ».
La télévison impose sa programmation, tout comme à l’école on impose des programmes. Il y a quand même un côté utile à ces choses là car parfois il faut coller les gens devant certaines oeuvres pour qu’ils réagissent et vous disent « ah si tu ne me l’avais pas dit je n’y aurais jamais pensé ».
Loin d’être pour le tout-discipline je suis cependant sceptique quant à la capacité de l’internaute à s’éduquer par lui-même. Ou alors, le risque, c’est l’ultra-spécialisation : j’aime tel ou tel activité, et je ne vais voir rien d’autre parce que le choix concernant ce que j’aime est déja suffisament vaste (et mis à jour).
C’est un peu ce qu’on est en train de faire avec l’école « à la carte » et le système des options. Le côté pervers de la chose, c’est qu’on ne dit pas « on supprime l’histoire-géo, on en fait une option en S ». Mais il ne m’as pas fallu trois ans de lycée pour comprendre que la majorité des S concernant ces matières n’entendent pas vraiment « option », mais plutôt « facultative »… et Dieu sait qu’ils rêvent que le français le soit aussi!