J’ai toujours voté PS aux présidentielles. Pour la première fois depuis mon entrée dans la vie citoyenne, j’envisage de m’abstenir. Non sans étonnement et mauvaise conscience. Alors que j’évitais de divulguer ce sentiment, plusieurs conversations récentes m’ont montré que je n’étais pas seul à percevoir comme un traquenard la future échéance électorale.
Un second mandat de Sarkozy? Je ne peux pas y croire. Echec sur échec, mensonge sur mensonge, un mandat des coups de mentons et des reniements, comment penser que les Français donneront cinq ans de plus au président le plus détesté de la Cinquième? Mais le souvenir de 2002 montre qu’on peut gagner tout en étant désapprouvé par une majorité de l’électorat (Chirac à 19,88 % au premier tour, plus faible score pour un président sortant). Si au lieu d’un bulletin de vote, on pouvait décerner un dislike, comme sur Youtube, nul doute que les trois principaux finalistes – Sarkozy, Hollande, Le Pen – apparaitraient aussi comme ceux qui totalisent le plus grand nombre de manifestations négatives.
Rien n’a été prévu pour enrayer une mécanique électorale qui marche quel que soit le nombre de participants. Mais justement, quelque chose s’est cassé. Chirac à 82%, pour une politique de droite dure, est resté comme une arête dans la gorge. Même si l’on a continué comme si de rien n’était, la machine est en panne. Alors que les hollandistes, conscients de la faiblesse de leur champion, commencent déjà à faire résonner la petite musique du vote utile, on voit gros comme une maison qu’il s’agit surtout d’un vote inutile.
Hollande rassure les éditorialistes. Ce qui ne suffit pas à me réconforter. L’impression demeure qu’il ne comprend pas plus ce qui se passe que le président des riches. Redonner les manettes à l’autre camp juste pour que quelques notables retrouvent le confort du maroquin paraît un objectif un peu mince.
Peut-on encore modifier la donne? Pour être élus, les candidats de droite – Giscard, Chirac, Sarkozy – ont toujours fait campagne en faisant mine d’être plus à gauche. A contrario, les candidats étiquetés à gauche – Jospin, Royal – ont toujours été battus lorsqu’ils se positionnaient au centre. Si rien ne change, Hollande risque bien de vérifier cette règle et de faire de l’ancien ménage le couple maudit de la présidentielle.
Personne ne veut la catastrophe. Mais dans l’ambiance de fin du monde qui pèse sur les sociétés développées, la détermination électorale paraît singulièrement relativisée. A force de se fiche de l’électeur, celui-ci finit par ne plus renvoyer la balle.
Plutôt qu’un « dislike », ce qu’il faudrait c’est un système de vote dans le genre de la méthode Condorcet (http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_Condorcet)
Ca éviterait par exemple de voir gagner un candidat de droite seulement parce qu’il a réussi à ne laisser se présenter aucun autre candidat de son bord politique, contre une gauche représentant plus de 50% des votes, mais divisée en plusieurs partis.
Dis donc André, t’as pas le moral ce matin. Commencer la journée comme ça, dur, dur… Pour ma part, je pense que, au moment des élections, il faut faire le job, sans état d’âme, et surtout se déployer ailleurs, le reste du temps, dans les multiples lieux, scènes et réunions où se fait également la politique : associations, coordinations, mouvements, etc.
@mkd: Oui, la question est aussi celle de la mécanique du scrutin. Ce n’est pas par hasard que la comparaison avec des procédures plus souples et plus récentes fait apparaître le caractère inadapté de nos outils démocratiques.
@Sylvain: Tout le monde n’a pas un caractère à se faire du tracas… 😉 Bien d’accord pour investir les autres scènes de l’action publique. Reste que l’élection, en démocratie représentative, n’est pas un geste mineur, mais la composante fondamentale du fonctionnement politique. Dommage qu’on se borne à regretter les taux toujours croissants d’abstention au lendemain d’un scrutin, plutôt que de se préoccuper de faire vivre la démocratie le reste du temps.