Alarmé par la sombre perspective du changement climatique et autres catastrophes écologiques, mon fils de douze ans a eu l’autre jour une idée lumineuse. Et si on quittait la Terre? Il suffirait de trouver une autre planète pour accueillir l’humanité et repartir à zéro. Désolé, mon chéri, mais tu vois, cette idée-là, elle n’est pas toute neuve. Pendant longtemps, la planète à coloniser s’est appelée Mars. Et puis on s’est aperçu que ça ne marcherait pas. Trop inhospitalier, trop loin, trop cher. Pas possible cette fois-là de rejouer le scénario du far-west. Il a fallu se faire à l’idée qu’on allait rester sur notre bonne vieille Terre, et qu’il faudrait en prendre soin.
Ce qui ne faisait pas l’affaire de la machine à rêves. Mars n’était pas sitôt sortie du jeu qu’on a inventé l’exoplanète. Entendons une planète, de préférence tellurique, située hors du système solaire. Personne ne dit plus qu’on pourrait y aller un jour, même lointain. Mais dans les recoins du néocortex, des connexions s’effectuent en dépit du bon sens. Le désir d’un asile cosmique est trop fort pour qu’on refuse de lui donner forme – fut-ce celle du rêve.
Et c’est ainsi que je trouve ce matin, en illustration de l’article de Sylvestre Huet « Gliese-581-G, exoplanète habitable? » ce qui s’appelle une « vue d’artiste », et qui ressemble comme deux gouttes d’eau à la planète bleue.
Un bon journaliste sait mettre en scène l’information: «Les astrophysiciens ont-il trouvé leur première exo-planète habitable? C’est à dire où l’eau pourrait être liquide… Peut-être, et il faudra de longues années avant de lever le doute.» Pourtant, quelques lignes plus bas, le doute est vite balayé: trop proche de l’étoile, Gliese-581-G lui montrerait toujours la même face, ce qui n’est pas un pronostic favorable. Qu’importe! Moyennant un titre assorti d’un point d’interrogation, par la grâce d’une « vue d’artiste » improbable, le lecteur aura eu quelques secondes de rêve, et c’est tout ce qui compte.