Un people, c'est quelqu'un

Qu’est-ce qui sépare la notoriété de l’état de « people » – personnage médiatique de plein exercice? Le traitement appliqué par la machine médiatique à François Hollande depuis son investiture comme candidat officiel du parti socialiste permet de préciser ce statut.

Depuis jeudi dernier, les gazettes ont fait apparaître à ses côtés sa compagne, la journaliste Valérie Trierweiler – en images pour Le Point, Match ou Le Monde Magazine, dans les titres pour L’Obs, tandis que L’Express affiche « Hollande intime »…

L’heure n’est plus à l’examen du programme. C’est bien son nouveau statut de présidentiable à part entière (et compte tenu du discrédit élyséen, de quasi-président avant l’heure), qui vaut à Hollande ce traitement de star, cette exposition qui le dote d’une personnalité, d’un statut plus dense que la simple publication de son portrait lorsqu’il n’était que candidat à la candidature.

Un people, c’est quelqu’un: pas seulement une fonction, une silhouette, mais un être au complet, dont on souligne l’épaisseur existentielle de mille manières, à commencer par sa vie familiale. Il est significatif de noter que les magazines d’actualité se rapprochent à ce moment précis du traitement des magazines people, dont cette métamorphose est la spécialité. C’est avec des photos d’album de famille qu’Hollande entame sous nos yeux sa présidentialisation – qui est d’abord une pipolisation.

3 réflexions au sujet de « Un people, c'est quelqu'un »

  1. La pipolisation fait ressortir d’intéressantes questions politiques. Ma mère est dans une maison de retraite. Elle regardait ce numéro de Paris-Match lorsque nous avons été pris à témoin par une auxiliaire de vie. « S’il est élu président, ça nous fera un beau mariage. Mais je pense que ça fera quand même de la peine à Ségolène. » Ne lisant pas la presse people, je n’avais pas d’avis sur les états d’âme de Ségolène, mais j’ai été surpris car je n’avais pas songé un instant que l’accession à la présidence pourrait avoir un effet sur l’état marital de Hollande. J’ai donc demandé « Vous pensez qu’un Président doit être marié, après tout un grand nombre de français aujourd’hui vit en union libre? » La réponse fût tout à fait politique. « C’est l’image de la France. Comment feront-ils à l’étranger s’ils ne sont pas mariés? »

  2. @Thierry: Plutôt que Ségolène, c’est Carla qui a du souci à se faire: sa succession dans les pages des gazettes a déjà commencé…

    @Julienb: Vous partez du principe que l’activité ou la compétence de François est mieux fondée et plus légitime que celle de Sabrina et Morgan… Est-ce si sûr? Si nous en jugeons pas le discours médiatique, il n’y a pas photo: l’empreinte de Sabrina et Morgan, qui ne s’afficheront jamais en couverture du Point, est confinée à la presse télé et people, alors que celle de François couvre un spectre plus large. Mais le spectacle des tergiversations au sommet de ces derniers mois n’apporte pas de preuve tangible que l’efficacité de l’activité présidentielle dépasse nécessairement celle d’un programme de divertissement télévisé. Si l’on observe le démarrage du processus de starisation, dans le premier tiers du XIXe siècle, on voit qu’il s’applique d’abord à des acteurs et des actrices, c’est à dire à des personnages caractérisés par leur exposition médiatique et la confusion de leur rôle et de leur personne, plutôt que par leur utilité sociale. Rien de neuf sous le soleil.

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