Au lendemain de la victoire de François Hollande aux primaires socialistes, Libération ornait sa Une d’une photo laudative de Sébastien Calvet (voir ci-contre) – tout en niant fermement, par la voix de Sylvain Bourmeau, toute orientation politique dans ce choix décrit comme purement esthétique.
Même si le recul permet aujourd’hui de mieux percevoir ce que cette option éditoriale pouvait avoir de propagandiste, le message porté par l’image n’est jamais limpide ni univoque. Comme le montre la discussion développée sous mon billet de l’époque, des lectures divergentes pouvaient s’exprimer sans qu’il soit possible de trancher de manière définitive dans un sens ou un autre.
L’impression délivrée par l’accueil des résultats d’un scrutin électoral est souvent de même nature. Alors que les citoyens se servent de tous les moyens à leur disposition pour adresser des messages au personnel politique, l’élection est comme une image dont on ne verrait nettement qu’un seul point focal – la victoire – tous les autres restant soumis à des interprétations fluctuantes, sans caractère affirmatif. Alors que les responsables de gauche envoyaient en 2008 à la figure de ceux de droite le fort taux d’abstention et la faible mobilisation de leurs électeurs comme des signes évidents d’une sanction politique, les mêmes symptômes sont aujourd’hui niés ou minimisés par les dirigeants en place, qui préfèrent souligner leur signification locale.
Au-delà de l’habillage rhétorique qui accueille traditionnellement le scrutin municipal, il n’en est pas moins intéressant de noter que, comme dans le cas de l’image, la part d’indécidable l’emporte. Comme Sylvain Bourmeau, Najat Vallaud-Belkacem peut nier l’interprétation punitive de l’élection, sans crainte d’être démentie par des arguments formels.
Cette imprécision du dispositif électoral, incapable d’attester autre chose qu’une victoire par convention arithmétique, est un inconvénient sérieux à un moment où le citoyen enrage de ne pas être entendu par ses édiles. Il est dangereux de se servir de cette marge d’indétermination pour encourager le déni. Car les électeurs pourraient alors choisir d’autres moyens pour se faire entendre.