Je reproduis ci-dessous ma réponse aux questions d’une journaliste de Libération, à propos du dernier sujet à la mode, le selfie, intronisé mot de l’année par les éditeurs du Oxford Dictionary.
Le selfie est moins un objet photographique que la manifestation des nouvelles conversations connectées.
Y a t’il une esthétique propre au selfie? La réponse est oui. Le succès récent d’un terme attesté depuis 2002 est lié à son identification comme style graphique, accéléré par sa réutilisation par les people sur les réseaux sociaux (notamment Rihanna sur Twitter). Une forme qui existait depuis les débuts du camphone, c’est à dire le tout début des années 2000, mais sans susciter d’intérêt particulier, apparaît désormais comme spécifique et reconnaissable.
L’appropriation par les people du selfie est un geste très caractéristique des nouvelles hiérarchies culturelles. Alors que la star était autrefois celle qu’on venait photographier et dont l’image servait de modèle, les réseaux sociaux ont imposé une forme de normalisation « par le bas ». Pour être plus proche de leurs fans, les célébrités adoptent des comportements vernaculaires, et admettent de diffuser une image d’eux-mêmes sans apprêt, spontanée, intime – voire de mauvaise qualité. Il s’agit d’une inversion des modèles: ce n’est plus le grand public qui imite les stars, mais les people qui imitent le grand public.
Le selfie n’est pas un portrait en majesté, qui vaut par la qualité de l’image ou la beauté du modèle. Pas de retouche ni de filtre. C’est un portrait en situation, une image connectée à envoyer dans l’instant, pour transmettre à ses contacts la vision la plus immédiate, comme s’ils pouvaient nous apercevoir en direct. C’est aussi une image dont l’authenticité est attestée par sa réalisation personnelle, qui doit être de préférence visible dans le cadre.
Toutes ces caractéristiques existent depuis les premiers autoportraits au téléphone portable, par des adolescents japonais. Le premier modèle de camphone, commercialisé par Sharp en novembre 2000, comprend un petit miroir en façade, pour faciliter l’autoportrait. Les images promotionnelles ne laissent aucun doute: l’outil a été pensé par le fabricant pour permettre l’autophoto à bout de bras, grâce à un objectif grand angle (celui qui fait un gros nez, et qui encourage donc à prendre la photo en plongée, pour atténuer cet effet).
Des modèles ultérieurs ajouteront un deuxième objectif, pointant vers l’usager, dans le même but. Il faut noter que c’est la première fois que l’instrumentation photographique intègre de manière native la possibilité de l’autoportrait. Il s’agit d’une vraie rupture, car la caméra est issue d’une pensée de l’image qui présuppose un monde coupé en deux – théâtre de la visibilité d’un côté, coulisses de l’opération de l’autre, qui ne sont pas censés se rencontrer. Pour faire un portrait de soi avec un outil photographique, il fallait jusque-là ruser avec le dispositif, utiliser un miroir, automatiser la prise de vue, ou demander de l’aide. Protégé par l’immunité du gadget, le camphone renverse tranquillement cette tradition.
L’accusation de narcissisme que l’on peut formuler à l’endroit de l’autoportrait dépend en réalité de ses usages. Image connectée, le selfie se présente comme une proposition d’interaction, dans un contexte conversationnel. Narcisse ne voyait que lui-même, ne s’intéressait qu’à son image. Il n’aurait probablement jamais ouvert un compte Twitter, ni dialogué avec ses fans. Le selfie est donc tout le contraire du narcissisme: c’est l’outil d’un échange social, qui se prête à la discussion, et peut d’ailleurs être commenté au second degré.
L’identification récente du selfie et son amplification médiatique ont produit un engouement remarquable, qui se traduit par la recherche des premiers autoportraits photographiques, le détournement de portraits ou de peintures célèbres par adjonction d’un smartphone. La viralité de ces appropriations démontre la vitalité du genre, et son caractère emblématique. Comme si le selfie était la signature malicieuse d’une culture visuelle qui s’est enfin reconnue.
Revue de presse
- Bim Adewunmi, « The rise and rise of the selfie« , The Guardian, 02/04/2013.
- Stephen Marche, « Sorry, your selfie isn’t art« , Esquire, 24/07/2013.
- Alice Pfeiffer, « Selfie: l’autoportrait devenu self-branding« , Les Inrockuptibles, 14/10/2013.
- Anon., « These old selfies dating back to the 1800s will blow your mind« , News.com, 17/10/2013.
- Jenna Wortham, « My Selfie, Myself« , New York Times, 19/10/2013.
- Tess Lochanski, « De Rihanna à Morano, l’ère du selfie pour tous a commencé« , Obsession, 26/10/2013.
- Lauren Provost, « Selfie: pourquoi vous n’avez pas fini d’en entendre parler« , Huffington Post, 17/11/2013.
- Victoria Turk, « Selfies Esteemed. How a Word Becomes Word of the Year« , Motherboard, 20/11/2013.
Lire également sur ce blog
- « Viralité du selfie, déplacements du portrait« , 31/12/2013.
28 réflexions au sujet de « Le selfie, emblème de la photographie connectée »
Si le selfie n’est pas un portrait en majesté, il est rare qu’il ne mettre pas son auteur en valeur. Il donne de mon point vue une authenticité et un naturel artificiels. Certes, il a un côté précaire d’un point de vue matériel et « vite fait » d’un point de vue de la construction mais il ne serait jamais posté s’il n’était pas favorable ; peut-être pas tant du côté esthétique que symbolique.
@ Isabelle Guyot: Un autoportrait peut-il jamais être « défavorable »? Un portrait peut-il jamais être « naturel »? Dans l’absolu, sans doute, ni l’un ni l’autre. Mais la question ne peut pas être posée dans l’absolu. Un genre visuel n’existe pas en dehors de sa réception ni de ses usages, qui fournissent une échelle du jugement elle-même évolutive et changeante.
Si l’on prend l’histoire du portrait en vue cavalière, il est évident que la mise en valeur du sujet apparaît comme la condition première de sa réalisation pendant plusieurs siècles, y compris pendant la majeure partie de l’histoire de la photographie (souvenez-vous de Walter Benjamin, lorsqu’il parle de l’artificialité des portraits photographiques de la fin du XIXe siècle, ou du caractère figé des photos amateur d’Un Art moyen de Pierre Bourdieu, qui continuent, en 1965, à imiter les codes de la pose d’atelier).
La pratique plus versatile et moins onéreuse de la photo numérique a sans doute contribué comme jamais auparavant à desserrer l’étau de cette contrainte. Là aussi, c’est la réponse de la réception qui nous l’indique: ce qu’on retenait des images postées sur Facebook vers 2007, c’était les photos de fête des adolescents, que l’on avertissait gravement de songer aux conséquences que pouvait avoir sur leur future carrière un portrait éméché ou dévêtu… Il paraissait évident que ces images ne contribuaient pas à mettre en valeur leurs sujets…
Votre réaction montre que les goûts évoluent, et que des formes perçues il y a quelques années comme transgressives se normalisent. L’appropriation par les people des codes du selfie n’est sans doute pas étrangère à cette évolution. La recherche d’une forme d’authenticité ou de dévoilement de l’intimité, évidemment toujours relative, constitue en tout cas une justification majeure de l’exercice, inversement proportionnelle à la préoccupation esthétique, qui n’y joue qu’un rôle secondaire.
C’est une forme adaptée d’indicialité qui porte cette signification. Non pas l’ancienne garantie abstraite par la technique, mais la manifestation dans l’image de l’instrumentalité du dispositif (le morceau d’épaule ou de bras qui indique l’autoportrait), qui n’est pas sans rappeler les choix anti-fictionnels revendiqués par Jean-Luc Godard. Plus globalement, l’attestation de présence du producteur par l’inscription du corps dans sa propre image, héritée de la fonction reliquaire de la photographie touristique, est une signature qui réunit de manière significative selfies, photos de pieds, mais aussi vidéos de GoPro, qui sont autant d’images de soi indicatives de la réécriture en cours des formes de l’identité visuelle.
Je ne suis pas certain que la préoccupation esthétique soit à ce point secondaire. C’est plutôt me semble-t-il que les codes ont changé.
Avant, la mise en valeur du sujet supposait la reproduction de codes esthétiques qui s’inscrivaient dans l’histoire de l’art et dans sa condition sociale. Le cadrage, la lumière, la pose, les vêtements, la coiffure, l’expression, toutes choses qui avaient finalement peu à voir avec la situation photographiée.
Avec le selfie, et plus généralement la photo conversationnelle, c’est l’inverse. Le portrait éméché ou dévêtu met en valeur le sujet en montrant qu’il a une vie sociale.
C’est la situation qui fait la belle image.
La généralisation d’images de type selfie ou pieds participent d’une intention esthétique, d’une recherche de la différentiation, et ce sont les photos à l’esthétique « traditionnelle » qui deviennent la pratique vulgaire.
Du coup je me demande si l’analyse de Bourdieu dans les années 60 qui voyaient dans les jugements esthétiques sur la photographie l’expression d’un système de valeurs implicites qui s’inscrivait dans l’appartenance à une classe sociale, est encore vraie. Si la différence aujourd’hui ne serait pas plutôt générationnelle.
Mais peut-être que l’on retrouve des codes dans le code, qu’au sein du selfie il existe des différences selon que l’auteur est ouvrier ou cadre, voir même que le selfie soit une pratique propre aux classes moyennes. 🙂
@ Thierry Dehesdin: Il y a bien sûr une esthétique du selfie. Mais ce serait probablement pousser le bouchon un peu loin que d’attribuer un « Kunstwollen » à ses auteurs. Le selfie n’est pas le mode d’expression unique de la photo connectée: même les ados continuent de se représenter « en majesté », de manière romantique (par exemple dans les covers de Facebook), et la pratique d’Instagram indique suffisamment que le ressort de la beauté constitue un pôle autonome identifié… Dans ce paysage, le selfie est situé à l’autre extrémité de l’échelle, du côté de l’immédiateté. La conjonction du selfie et d’un filtre me paraît par exemple plus rare que son absence. L’appropriation par les people de cette forme vise ostensiblement le « naturel » (fut-il joué) et l’authenticité (fut-elle mise en scène). Sans exclure la possibilité d’un selfie qui jouerait la valorisation et l’esthétique, ce n’est en tout état de cause pas sa signification principale.
« Mais ce serait probablement pousser le bouchon un peu loin que d’attribuer un “Kunstwollen” à ses auteurs. »
De même qu’aux auteurs de lolcats, de pps « gaulois » bien gras etc…
Ho, André? tu nous as habitués à des articles intelligents et « à contenu »…
Le calendrier des postes des années 50 attend toujours ses 50 thèses de doctorat d’Etat en esthétique, sémiologie et histoire de l’Art!
Ho, Frankie, on se connaît? Pourtant, on ne dirait pas qu’on a usé nos fonds de culotte sur les bancs de la même fac… Pour info, le doctorat d’Etat n’existe plus depuis 1985 (ouf!). Mais le calendrier (illustré), oui, c’est un support particulièrement significatif de la culture visuelle! Ça m’étonnerait néanmoins qu’on voie ce sujet de sitôt au registre des thèses, car, comme dans ton commentaire, la Distinction dresse une barrière infranchissable contre ce genre d’objets indignes. En revanche, sois tranquille, les projets sur Derrida et l’art contemporain gardent toutes leurs chances pour les bourses de thèse (mais pas sous ma direction ;)…
Je persiste à penser (pour l’instant) que l’autoportrait est un sujet vieux comme le miroir et que le selfie est, comme son nom l’indique d’ailleurs, un sujet intéressant de sociologie à la grande semaine. Et que la Dignité des objets vaut bien de maturer quelques durées de calendrier des postes, que je passerai peut-être sans Derrida, et probablement sans Jeff Wall!
Non, on ne se connaît pas, je crois… mais ma présence ici tendrait à prouver que l’intérêt pour tes tapuscrits, même virtuels, dépasse largement les milieux universitaro-sémio-doctoristiques, même sans plus d’Etat !!!
Frank, je vais te dire comment je vois les choses. Il y a ceux qui ont attendu Libération pour découvrir que le selfie existe, moi j’en ai toute une collection sur mon disque dur, que j’ai commencé en 2004, bien avant de savoir que cet objet allait avoir un nom. Le fait d’avoir repéré depuis longtemps et de façon parfaitement indépendante ces signaux me rend très tranquille sur leur autonomie et sur leur intérêt.
Si je ne t’ai pas convaincu que le selfie n’est pas simplement un autoportrait, c’est que je n’ai pas posé suffisamment clairement la question de la photo connectée. Rien de grave, ce sera l’objet d’un autre billet.
Juste une chose, en attendant: ce que regardent Stewart et Caterina au moment où ils prennent la photo reproduite ci-dessus (« Hi mom! »), ce n’est pas un miroir, mais la mère de Caterina. La photo connectée n’est pas un reflet complaisant, mais une image qui s’adresse à quelqu’un. Pour l’apercevoir, il ne suffit pas de faire comme si on était face à une image, c’est à dire regarder seulement à l’intérieur du cadre, il faut aussi tenir compte des informations de contexte, autrement dit tout ce qu’il y a autour. C’est seulement lorsqu’on ne le fait pas (comme tous ceux que j’ai lu jusqu’à présent sur ce sujet) que l’on peut confondre selfie et autoportrait. Ma collection, réunie sur Flickr, comprend systématiquement les légendes rédigées par les auteurs, et ça change tout. Ben oui, je suis quelqu’un qui m’intéresse aux contenus, pas seulement aux apparences… 😉
« Le selfie est moins un objet photographique que la manifestation des nouvelles conversations connectées. »
Si on en juge par: « Bien que la définition précise du téléphonoscope date de 1883, cette invention, sous le même nom, était depuis un certain temps connue. En effet, la rumeur populaire prétendait que Thomas Edison venait de mettre au point une invention servant à communiquer à distance et transmettant autant l’image que le son. » ( http://fr.wikipedia.org/wiki/T%C3%A9l%C3%A9phonoscope )
…il s’agit d’un désir tout à fait spontané des utilisateurs du téléphone, peut-être tout simplement parce que d’ordinaire c’est la vue qui permet d’identifier les personnes avec qui on parle.
La « visiophonie » expérimentée par le CNET à Biarritz en 1984 ne semble pas avoir séduit grand monde. Les premiers utilisateurs réels semblent avoir été ceux qui vivent loin de leur famille à cause de leur travail (émigrés, cadres en déplacement).
@ G L: Invention littéraire d’Albert Robida, le « téléphonoscope » anticipe sur la télévision plutôt que sur la vidéo interactive (Skype), définie comme un média de communication directe. La « conversation connectée » désigne de façon privilégiée les médias asynchrones que sont le MMS, le web ou les réseaux sociaux.
L’inventeur littéraire de la vidéo interactive (genre Skype) est probablement Hugo Gernsback en avril 1911 dans son roman Ralph 124C 41+, sous le nom de « Telephot »:
http://www.flickr.com/photos/44823747@N02/6609680079/
Au fait, fais-tu une différence, sous l’aspect du partage, entre la selfie et le classique portrait souvenir de vacances (« Alors là c’est moi devant la Tour Eiffel, Là c’est moi à Times square », etc.) ?
Mis à part que la selfie est instantanée, présumée ludique, et présumée appréciée des destinataires 😉
@ JD: C’est une très bonne question. Oui, il y a évidemment un lien: le selfie est un descendant de la photo reliquaire familialo-touristique (http://culturevisuelle.org/icones/2514#relique ) beaucoup plus que de l’autoportrait pictural.
La différence, pour résumer, en reprenant une expression d’Olivier Beuvelet, qui caractérise ce type d’image par la formule: « j’y ai été« , ce serait qu’on passe à: « j’y suis! »
Exemple: Flickr 06/08/2004, « Obligatory new hair picture, moblogged as i talk up a big hill in potrero hill » (sic) http://www.flickr.com/photos/molly/158610/ (avec le selfie, il faut le contexte, l’image seule ne suffit pas).
Le cadrage me semble également très différent.
Dans la photo reliquaire familialo-touristique, le plan est large. Il est important de montrer le lieu, ce qui suppose des cadrages qui vont du portrait en pied au plan américain.
Le selfie démarre au plan américain et est le plus souvent un gros plan, qu’il s’agisse de montrer son visage, ses pieds ou ses fesses non?
Je crois que ça n’a pas beaucoup de sens de produire des différenciations trop tranchées, comme si nous étions dans un exercice professionnel, qui sait distinguer entre « plan italien », « plan américain » et « plan poitrine »…
L’exercice de la photo privée est plutôt fait de continuités entre ces différents cadres. Exemple de productions de « selfies touristiques »: http://www.flickr.com/photos/gunthert/11069620644/
@ Thierry Dehesdin : il me semblait que la selfie, au contraire, était en général destinée à montrer le « je » là où il se trouve (« j’y étais ») ou en situation (« il m’arrive ceci », « je suis comme ça aujourd’hui »).
A l’inverse la photo du profil d’AG sur Facebook, qui semble être une selfie (photo « ratée », etc.), ne donne aucune information sur le contexte ou l’état d’esprit du personnage (à moins qu’il n’y ait un message uniquement perceptible par des proches). A ce titre, elle paraît être en réalité un autoportrait, qui joue avec les codes de l’égo-portrait (proposition de traduction de « selfie »;-).
Puisque j’ai eu un bon point, nouvelle question : quelle différence entre le portrait de soi dans les annonces de rencontres sur le Net et la selfie ? Le premier ne serait-il pas l’ancêtre immédiat, le précurseur historique de la seconde ?
(N’ayant pas suivi de très près vos débats, mes excuses si ce point à déjà été évoqué).
Le dispositif, l’appareil à bout de bras, induit le cadrage.
Une évolution du matériel (je pense au Sony QX 10) en désolidarisant l’objectif du smartphone pourrait changer l’esthétique du selfie.
@ JD: Il y a bien une explication contextuelle à ma photo de profil, à laquelle on accède en cliquant sur l’image… (c’est pas facile de discuter de photo connectée avec des gens qui ont encore l’habitude de retourner l’épreuve pour lire la légende… 😉
L’autoportrait est dans la logique du portrait. On doit dans un premier temps choisir un cadre pour poser à l’opposé son appareil sur un pied ou un mur. Et on prend la pose on n’étant contrarié que par la brièveté du déclencheur à retardement.
On peut prendre la pose pour un autoportrait comme on le ferait pour un portrait.
Le selfie me semble plus instinctif. La photo peut suivre presque immédiatement l’envie de photo. Et le cadrage est contraint par le bras et donc la distance objectif/sujet. Forcément collé à ceux que l’on veut inclure dans son selfie. (C’est frappant dans ton lien André 🙂 )
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