Alors, amateur ou pas, le portrait de Hollande par Depardon? Deux jours après la divulgation de l’image, la discussion se poursuit et se complexifie. Parmi les éléments de ce débat, mon commentaire sur LeMonde.fr a joué un rôle non négligeable. Diffusé juste avant la présentation officielle de la photo à l’Elysée, cet avis intitulé « Un clin d’oeil à la photo amateur » a été largement repris en raison de la position de carrefour d’audience du site et de sa publication très en amont de la conversation.
Il vaut la peine de se pencher sur les dessous de cet entretien. Confié à Pauline Pellissier, journaliste pigiste, le nouveau portrait officiel n’avait pas été considéré comme une matière suffisamment sérieuse pour faire intervenir un poids lourd. Mais c’est en rédactrice web expérimentée que la journaliste programme de publier son article à l’heure même de la présentation officielle, prévue pour 16h, et m’appelle dans la matinée pour garantir l’entretien. La première idée est de publier un commentaire avant même de disposer de l’image, sur les hypothèses disponibles a priori. Un premier entretien téléphonique est effectué vers midi sur ces bases.
Mais dès le début de l’après-midi, la fuite du portrait sur Twitter accélère le processus: Pauline Pellissier m’envoie à 14h30 l’image qu’elle vient de recevoir, et une seconde interview est réalisée dans la foulée. L’activité sur Twitter devenant de plus en plus frénétique, le papier sera finalement publié dès 15h45, avant même la présentation par Depardon de sa photo (un autre entretien est effectué avec Cyril Bonnet pour L’Obs, qui avait également été prévu d’avance).
En bon élève de Louis Marin, le portrait présidentiel est un sujet qui m’intéresse. Un commentaire développé de celui de Philippe Warrin publié en 2007 sur mon blog est probablement ce qui m’a valu mon statut de spécialiste de photo de président. Répondant à l’interrogation d’amis sur Twitter, j’avais parié dès le 23 mai pour les jardins et avais loltoshoppé le 30 un montage de la tête de Hollande sur la photo de Chirac de 1995 (voir ci-dessus). Le portrait de Depardon était attendu. Comme tout le monde, j’étais curieux du résultat.
Je ne fais pas partie du fan-club de Depardon. Tout en respectant une œuvre majeure, je n’aime pas le maniérisme de sa dernière période, bien représenté par son exposition « La France de Depardon » à la BNF, pas plus que la figure de « père de la photographie » qu’il se donne depuis la disparition de Cartier-Bresson. Comme chaque fois que je vois s’ériger une statue, mon mauvais esprit ne peut résister au réflexe du coup de patte. Rapprocher le travail de Depardon de la photo amateur est évidemment un jugement ironique, à l’opposé de la réputation du maître.
En croyant que je traite leur héros d’amateur, les depardonologues s’offusquent et s’étranglent. On ne peut leur en vouloir d’avoir pris au premier degré ma blague de potache. Mais l’idée esquissée dans les propos recueillis, que j’exprime plus au long dans mon propre billet, est un peu moins simple. En voulant réaliser un effet d’éclairage alambiqué, Depardon a raisonné pour la galerie d’art, et a oublié que la photo du président est une image qui s’adresse au grand public. De longs paragraphes d’explication sont nécessaires pour faire apprécier ce qui passe au premier coup d’oeil pour une erreur de débutant: avoir laissé le sujet dans l’ombre.
La réaction des réseaux sociaux a modifié la nature de l’information. Le portrait présidentiel était programmé pour être traité comme une nouvelle secondaire. L’intensité de la réponse, caractérisée par la production rapide d’une vingtaine de détournements, événementialise le phénomène. Compilés en temps réel sur plusieurs sites de presse avant même la présentation officielle, les remixes en polluent le rituel autosatisfait. A partir de 16h, de nombreux internautes prennent connaissance simultanément du portrait et de sa caricature. La conversation et son recyclage médiatique ont transformé la réception de l’image en jeu de massacre. Avec son évocation de la photo amateur, mon entretien au Monde.fr renforce cet accueil goguenard.
Je connais bien la série présidentielle, et mon goût pour l’image sans apprêt me fait apprécier la « photo de gendarme » (en réalité exécutée par le portraitiste Jean-Marie Marcel): la posture hiératique de de Gaulle, lointaine imitation du Louis XIV de Rigaud, qui cadre parfaitement avec la fonction de l’image – présenter une vision solennelle du dynaste républicain. J’aime la modestie du traitement qu’a trouvé Gisèle Freund pour le portrait de Mitterrand, qui s’inscrit dans la série tout en produisant une variation pertinente, en accord avec l’image que le président socialiste voulait donner de lui-même – celle d’un intellectuel proche plutôt que d’un monarque lointain.
En choisissant Freund, photographe des grands écrivains des années 1930, Mitterrand savait exactement quelle image il voulait obtenir. Ce qui me frappe dans le choix de Depardon, c’est que Hollande semble avoir eu la démarche exactement inverse. Quoique ce soit le président qui suggère le jardin pour se distinguer de son prédécesseur, il n’a pas souhaité imposer une image. Il laisse la main au photographe, dont l’idée est d’essayer de rendre dynamique le portrait présidentiel.
On peut interpréter cette liberté comme l’expression du respect de la démocratie à l’égard de la culture. On peut aussi y voir une forme d’indécision sur la signature politique que souhaite imprimer le nouveau président. A la différence de ses prédécesseurs au moment de leur entrée en fonction, Hollande reste un personnage relativement mystérieux, moins connu, et dont la personnalité est pour l’instant moins lisible. Le mouvement voulu par Depardon n’est-il qu’une affèterie d’esthète, ou renvoie-t-il à une signification politique profonde? Je crois que la réponse à cette question n’est évidente pour personne – et c’est bien là ce qui différencie Hollande de Giscard, Mitterrand ou Chirac, dont la stature plus affirmée permettait d’interpréter le portrait de manière moins hasardeuse.
2200 vues en 24h pour mon propre billet sur Culture Visuelle, près de 10.000 vues pour l’échantillon de remixes mis en ligne sur Flickr sont des chiffres exceptionnels, rapportés à mon activité habituelle de blogueur. Tous les indicateurs disponibles attestent que la question apparemment sans importance de la photo présidentielle a passionné les Français. Contrairement à l’avis des pisse-froids qui voudraient réserver l’espace médiatique aux « vrais » sujets (et nous savons depuis Platon qu’une image ne peut pas être un « vrai » sujet…), mais aussi à l’appréciation des rédactions qui jugeaient ce sujet secondaire, l’économie de l’attention désigne bel et bien cette image comme affectée d’une prosécogénie élevée.
Le fait que je consacre cette année mon billet, non à l’image, mais à sa réception, en fournit une confirmation supplémentaire. Ce dont les détournements visuels sont le symptôme, mais qui n’est que l’élément le plus visible d’une activité de commentaire bien plus étendue, est l’appropriabilité très particulière de ce produit culturel.
Nous réagissons comme si le portrait du président nous appartenait à tous, comme si chacun avait son mot à dire. Il n’est pas forcément simple de s’exprimer à propos d’une image. Mais celle-ci nous tend les bras: elle n’est pas compliquée à analyser, chacun connaît ou croit connaître ses tenants ses aboutissants, ce qu’est un portrait, quelle est la fonction d’une image officielle. La série bien connue des portraits permet de faire des comparaisons et de fonder un commentaire. Malgré les restrictions légales, il semble que cette image puisse être copiée et publiée comme s’il s’agissait d’un bien commun. Oui, cette image est importante pour beaucoup de gens, qu’ils s’y reconnaissent ou pas, car elle leur fournit l’occasion de s’immiscer dans la fabrique du spectacle du pouvoir, dont ils sont d’habitude écartés.
La photo du président est à tout le monde. C’est pour avoir oublié cette leçon simple que Depardon, préoccupé par sa propre statue plutôt que par le portrait de François Hollande, a donné à sa photo l’inquiétante étrangeté qui attise les commentaires.
22 réflexions au sujet de « Depardon, les coulisses d'un commentaire »
C’est fou comme le mot « amateur » utilisé en photographie suscite de pathos.
Depardon est un photographe professionnel qui a réalisé une commande. Ce n’est pas parce que l’on réalise une photographie qui a la saveur d’une photographie d’amateur que l’on est un amateur comme le montre le hors-champ de sa prise de vue http://www.lemonde.fr/politique/portfolio/2012/06/04/les-coulisses-du-portrait-officiel-de-francois-hollande_1712189_823448.html
C’est la même logique qu’en publicité. Il faut des moyens très lourds et des professionnels très compétents pour qu’une photo ait l’air « naturelle ». 🙂
« Depardon a raisonné pour la galerie d’art, et a oublié que la photo du président est une image qui s’adresse au grand public. »
C’est exactement ça mais c’est aussi le piège quand on s’adresse à un photographe comme lui qui reste un auteur assez marqué. Je le pense conscient des contraintes terribles de l’exercice mais en même temps il se dit qu’on fait appel à lui pour ce qu’il est et que donc il doit affirmer son point de vue. Ça fait surement grand écart et c’est bancal…d’où les réactions.
Merci pour tes précisions sur ton premier entretien, c’est vrai et fou de voir comment ce terme « amateur » a polarisé les débats, comme souvent.
Pour poursuivre sur ta conclusion, pour une photo grand public comme celle ci, ça aurait été l’occasion de faire un petit reportage documentaire en vidéo, des premiers rendez-vous à la prise de vue EN COMPLET, en passant par l’éditing et les discussions entre les différents intervenants. Ça aurait été un super cas d’école de ce que peut être la photographie. Les photos making-of ont d’ailleurs plutôt bien tourné, signe d’un intérêt pour les coulisses de ce travail. (c’était une première d’ailleurs, des photos backstage d’un portrait présidentiel?) Peut être aussi que ce n’est pas possible d’avoir d’autres vues sur cette photo du fait qu’elle doit être une et indivisible, comme la fonction qu’elle représente. En montrer les coulisses, c’est faire descendre la photo de son piédestal, elle est moins absolue.
A ma connaissance, il n’y a que le documentariste qui suit Hollande qui a filmé mais je doute qu’il en garde grand chose dans son montage final.
@ Pierre Morel: Tout à fait d’accord, ça aurait été génial d’avoir une vision complète du processus et non pas toujours le « coup de baguette magique » de la prise de vue… Comme tu l’expliques bien dans ton billet, le choix d’une photo dépend aujourd’hui de nombreux autres paramètres. En fait, c’est le regard de Depardon qu’il nous aurait fallu sur cette histoire: il aurait dû être, non le portraitiste, mais le documentariste du portrait…
Pour la prosécogénie : Céline me dit « il faut parler du cadrage ! » En effet, donner de l’air au président, c’était transformer le portrait en une étrange image… Et ce vide attire. En la comparant, on a l’impression qu’il peut s’y passer quelque chose, ou qu’il manque quelque chose (les autres convives du pic-nique ?). Alors que les autres portraits sont bouclés, verrouillés…
Bon, sinon, tout a été dit, en fait… Je résumerais ça comme ça : puisque je suis snob, puisque j’aime bien cette image, c’est qu’elle n’est pas faite pour les mairies…
Et c’est vrai que l’effervescence autour est amusante et intéressante.
« La leçon » selon laquelle « la photo du président est (serait) à tout le monde » est-elle un enseignement d’aujourd’hui ? Comme dit T. Dehesdin, il s’agit d’une commande : que le photographe veuille y imprimer quelque chose comme une marque me semble simplement logique (il répond à la commande tout en faisant son travail). Je te trouve assez dur avec Depardon (le film qu’il a commis sur crâne d’oeuf était quand même très réussi, il faut le dire) (sans pour autant être depardonolâtre)(non plus que -logue) car je trouve, comme A. François, la photo réussie (nono est bien dans sa posture -côté jardin- mais celle du précédent valait aussi son pesant de drapeaux…)(y’a guère que vge pour en avoir mis plus) (de drapeau, pas de prosécogénie). Cette photo est très bien (elle sera tirée à au moins trente six mille et quelques exemplaires) : la preuve, c’est qu’elle fait parler d’elle… Demande-t-on autre chose à une photo ?
Mais j’aime beaucoup les films de Depardon! Et je n’ai pas dit que Hollande a l’air benêt ou que la photo ressemble à une photo de mariage, toutes choses qu’on peut lire ici et là. J’ai simplement confronté aux deux projets identifiables de Depardon lui-même, qui portent sur la dynamique et sur l’éclairage, le résultat observable, qui n’est pas tout à fait à la hauteur. On ne perçoit pas le mouvement si l’on ne sait pas que Hollande marche, et le contraste entre l’avant-plan et l’arrière plan peut (et a) été interprété dans un sens contraire à l’intention initiale. Je comprends très bien qu’on puisse trouver cette photo réussie (c’est clairement le cas de Depardon), même si, comme le dit justement Alain, il faut probablement être un peu snob pour la voir ainsi.
Maintenant, si tu veux une vraie critique, je trouve que Lartigue a été un inventeur génial par rapport à l’exercice, et que la timide interprétation de Depardon fait pâle figure en comparaison, alors qu’on pouvait attendre de sa part qu’il se hisse à ce niveau d’originalité. On peut toujours lui trouver des excuses en répétant « commande », « commande »… Et pour Lartigue, ce n’était pas une commande?
Quant à la « leçon » sur l’appropriabilité, tu as parfaitement raison, mais le fait d’avoir écrit un billet sur le même phénomène il y a cinq ans me permet de constater que je n’y avais pas moi-même prêté attention… 😉
Vge avait à l’époque un rapport étonnamment décontracté vis à vis de son image, qu’il s’agisse du film de Depardon ou de la photographie de Lartigue.
Il me semble qu’en effet la mèche allumée par le mot « amateur » est significative. D’abord que le terme continue d’être considéré comme péjoratif, ensuite qu’il est au cœur d’un débat bien plus profond…
Aussi un clin d’œil au dessin d’enfant: bras droit plus gros que le gauche.
Il y a une autre photo où j’avais déjà trouvé qu’il avait un bras plus long que l’autre. Il a une pose type avec torsion d’épaule?
Il y a l’énigme du bleu blanc rouge au fond de l’image, un peu torture visuelle…
@ Thierry Dehesdin: La mémoire embellit les souvenirs! Le film de Depardon sur Giscard, « Une partie de campagne », a été interdit de diffusion par son commanditaire et ne sera finalement rendu public qu’en 2002…
En 1974, Depardon était un preneur d’images qui prenait des risques. Aujourd’hui, c’est dans les salons de l’Elysée qu’il présente sa photo officielle «sur un chevalet, sous un voile de velours, comme un tableau religieux ou commémoratif prêt à être inauguré en grande pompe. Même les plus monarchiques de nos présidents n’étaient pas allés aussi loin dans le cérémonial de la révélation de leur image au bon peuple» (Marc Lenot).
@André Depardon a projeté son film à la cinémathèque dans le cadre d’un cour de Jean Rouch, peu après l’élection et alors qu’il était encore interdit. En fait VGE aimait bien le film, mais ne savait pas trop quoi en penser sur un plan politique. C’était Poniatowsky (un nom fameux que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre) qui l’avait bloqué (avec l’accord de VGE bien entendu). Toute l’histoire du film telle que Depardon nous l’avait raconté était folle. Personne ne croyait aux chances de VGE avant le premier tour, et Depardon avait pu le suivre parce que tous les communiquant de la droite s’en foutaient. Après le premier tour Ponia avait essayé de virer Depardon, surtout que du coup la voiture de candidat n’était plus assez grande, et VGE avait imposé qu’il continue à tourner. Je suppose qu’il avait établi des liens d’amitiés avec Depardon et sa bande qu’il n’avait jamais eu dans le passé de par son origine sociale et sa trajectoire politique. La façon sous cet éclairage dont, dans le film, il parle de l’intervention de Michel d’Ornano entre les deux tours est terrible.
Depardon a même proposé à Ponia de censurer les séquences gênantes, mais après analyse, c’était tout le film, qui posait problème. Mais Depardon était certain que VGE autoriserait un jour la diffusion du film. Et en attendant, en dehors de cette escapade, il était enfermé dans un coffre. 🙂
Dans le dézinguage de Depardon ici et là, il y a tout un mépris villien et branchouille pour celui qui reste, et revendique de le rester, un pedzouille. J’attends avec gourmandise de voir comment va réagir Tecknikart, qui a exploré la Creuse profonde comme on découvre Ploucland.
Il y a aussi la nostalgie d’une présidence royale, d’un art officiel où le détenteur du pouvoir n’est jamais assez chamarré, assez figé, assez majestueux.
La photo a été détournée ? La belle affaire, quand on se souvient comment l’a été celle de Foutriquet 1er par le photographe de la Star Ac’, émission qui enrichit la chanson française comme une pissotière améliore une chapelle romane.
Ce caractère paysan se retrouve (et j’ignore si c’est voulu) dans la position des bras. Traditionnellement, càd avant la régulation automatisée de la distribution d’engrais par tracteur muni d’un GPS, les bras étaient les outils principaux du paysan, massifs, qui devenaient encombrants dès qu’ils ne servaient plus. Cet encombrement (et pour d’autres raison, bien sûr), on le retrouve ici. Veut-il dire qu’Hollande, au fond, n’aime pas poser ? Un photographe professionnel m’avait sollicité pour une série. J’avais accepté, à condition qu’il ne me fasse pas poser, qu’il me photographie pendant que je m’occupais à parler avec lui. Si je pose, j’ai une tête de crétin ou d’assassin.
Je pense que ce qui appelle l’étrange de cette photo ( par rapport aux précédentes ) c’est essentiellement l’éclairage sur le visage.
L’éclairage est trop diffus, trop léger. Le visage n’est pas marqué par une lumière dirigée.
En extrapolant, on pourrait dire qu’il disparait dans l’image. Nous avons l’habitude de voir des portraits très éclairés dans la presse, en publicité.
Cela nous amène à une photographie d’avantage image que portrait.
F.Hollande est en retrait. Lui le sujet principal de cette image n’est finalement qu’un élément dans l’image, dans un cadre.
« Alors, amateur ou pas, le portrait de Hollande par Depardon? »
Pour repartir sur ce débat, je dirais qu’elle n’est pas du tout amateur. Elle est différente, engage une lecture différente d’un portrait classique. Nous sommes englués dans des codes à respecter.
Je l’aime cette photo car elle laisse place à l’erreur, à l’imperfection. C’est une belle idée l’indulgence même en photographie.
la photo de Lartigue est chouette, la mieux de l’échantillon, sans conteste, en effet, et on saute (aussi) comme des cabris en criant « commande commande commande »… :°) Je manquais de la façon dont la photo a été présentée au « public » par Raymond, mais elle est réussie par principe je crois (il s’agit de la photo du PdlR, française qui plus est) et je crois que c’est parce que c’est lui justement qu’elle est réussie (ça aurait pu être mieux, peut-être mais on fait ce qu’on peut) : le snobisme dont tu parles via Alain François est une composante, probablement, du goût pour cette photo mais ce que pointe PMB en signifiant une lutte des classes est aussi présent…
J’ai immédiatement pensé à « American Gothic » de Grant Wood, ça renforce le coté paysan à mon avis
L’argumentaire du « caractère paysan » est tout de même une vaste blague. On est dans les jardins de l’Elysée, rue du faubourg Saint-Honoré. Rien dans la biographie de Hollande, fils de médecin passé par l’ENA, ne le relie de près ni de loin au monde paysan. Reste les films de Depardon. Cela suffit-il à donner à tout ce qu’il photographie un air de basse-cour? Il n’y a que le fan-club du photographe pour le croire…
@} D’accord avec André Gunthert le caractère paysan est surfait chaque photo de Depardon ne transforme pas le sujet en paysan ou alors il faut aller jusqu’au bout : retour à la « paysannerie française du XVIII ». Mais Hollande n’est pas un révolutionnaire, etc.
Sur l’idée d’amateur : un professionnel de la photo fait un portrait d’un président « amateur » (c’était d’ailleurs un argument de la droite) , mot pris comme normal pris comme banal. La recherche de la banalité l’amène à trouver une distance qui l’éloigne de l’Élysée. Il ne veut pas y habiter, (préfère les plateaux télé aux journalistes dans son bureau). Cette distance le rapproche de nos problèmes. C’est un ami venant dans notre ombre au premier plan.
Je peux interpréter à mon tour, pardon ! On dirait plutôt une prise de photos dans les jardins, d’un jeune marié avec son épouse Marianne, incarnée ici par l’air qui l’enveloppe et portant une cocarde à gauche dans ses cheveux. (La France c’est l’air que nous respirons, l’espace où nous agissons, évocation de l’hexagone dans l’espace vert).
Bravo André pour ton portrait Lolphotoshop.
Je pense qu’il aurait suscité beaucoup moins de commentaire que la photo de Depardon.
Hollande a la componction qui sied à la fonction et regarde les français dans les yeux avec autorité et naturel sans se mettre à distance comme Chirac.
C’est peut être la la solution. Deux ou trois décors (la bibliothèque, deux angles différents pour le jardin), quelques costumes (sombres) pour tenir compte d’un éventuel embonpoint, avec et sans décorations, et un photomaton à coté de la guitoune du garde républicain. Si les français se décident à élire des femmes, les frais vont un peu grimper car à chaque nouveau quinquennat, il faudra renouveler la photo de la tenue de la Présidente pour tenir compte de la mode.
« Rien dans la biographie de Hollande, fils de médecin passé par l’ENA, ne le relie de près ni de loin au monde paysan. »
Certes. Mais il a été l’élu d’une région dont le caractère citadin n’est pas ce qui se voit d’abord. Hollande a donc un ancrage rural qu’ont eu, même si ce fut parfois surjoué et plus symbolique que réel, tous ses prédécesseurs. Sauf un, et cela a pu contribuer à son échec : un type pas très grand et un peu vulgaire qui s’ennuyait et n’arrivait pas à le cacher dès qu’il fallait quitter Paris la grand ville ou ses succédanés : Marrakech ou le Cap Nègre. Dès qu’il fallait fréquenter d’un peu près paysans, ouvriers, pêcheurs, tous gens n’arborant pas, horreur, Rol.x et stylo Mont Bl.nc.
@ Thierry Dehesdin: Tu as un point Kaganski! 😉
Sarkozy se fichait comme d’une guigne de la photo officielle, un photomaton l’aurait plutôt arrangé… A l’évidence, ce sont les Français qui réclament un minimum de cérémonial… Et le choix d’un auteur consacré comme Depardon, après Warrin, allait bien dans le sens d’une réinstitutionnalisation de l’exercice…
@PMB: Oui, Chirac aussi aimait bien la vaches – au salon de l’agriculture, porte de Versailles, et surtout quand il y avait des caméras… Cela n’empêche pas qu’il s’agit d’un grand bourgeois, pas d’un paysan! Si on voit un élu à travers le prisme de son territoire, serait-il pertinent de décrire Dominique Strauss-Kahn comme un loubard de banlieue?
je précise un peu, je ne cherche pas du tout à justifier un caractère « paysan » qu’on pourrait prêter à François Hollande mais juste que sur la photo à laquelle on prête un caractère « champêtre »,
(« Jamais l’Elysée n’aura autant ressemblé à un manoir champêtre (on a évoqué à juste tire un “Relais et Châteaux”) et la tension entre le vert et la pierre (où est la vache a-t-on dit) exprime parfaitement l’attachement à la paysannerie et au rayonnement de la puissance politique. » nous dit zaha redman par exemple)
l’impression « paysanne » est réhaussée dans mon imaginaire par le lien que j’établis avec « American Gothic » mais je suis peut être le seul.
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